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samedi 19 février 2011

Education : la transmission du savoir au centre du système

Education : la transmission du savoir au centre du système


La France a besoin de scientifiques

Tout d’abord une pétition, initiée par les derniers médaille Fields et prix Nobel, signée par les présidents de onze sociétés savantes, et, à ce jour, plusieurs milliers d’internautes, dont une brochette impressionnante de scientifiques de haut niveau : La France a besoin de scientifiques (http://algorythmes.blogspot.com/2010/11/petition-la-france-besoin-de.html). Elle dénonce sur un ton d’une virulence peu habituelle dans ces milieux la baisse du nombre de cours scientifiques dans les sections scientifiques : moins de la moitié des horaires en première S sont maintenant consacrés aux sciences. La réforme Chatel ne fait que prolonger un lent déclin : depuis vingt ans, les enseignements scientifiques ont décru de 20%.
Alors que la Chine et l’Inde rattrapent à grandes enjambées l’Occident et l’Amérique, investissent dans la recherche le développement, forment plus de scientifiques que tous les autres pays réunis, alors que nous nous trouvons devant d’immenses défis énergétiques, de santé, de vieillissement, de développement durable, cela, comme le répètent plusieurs fois ces scientifiques, ce n’est pas raisonnable !
Certes, comme l’on relevé certains, ils auraient pu se réveiller un peu plus tôt, ils auraient dû aussi dénoncer l’abandon de l’histoire en terminale S (veut-on former des scientifiques ignares ?-ce n’est pas ainsi qu’on revalorise les sections littéraires, à supposer que cela soit nécessaire), et aussi la diminution des horaires de littérature en terminale littéraire, et l’abandon des mathématiques (ce n’est toujours pas ainsi qu’on revalorise les filières littéraires).

Défendre les disciplines

S’il a été possible  à un gouvernement de maltraiter ainsi un système scolaire qu’il n’aime guère (l’apprentissage, c’est bien mieux, les entreprises, elles, savent former les jeunes qu’il leur faut), c’est qu’un slogan généreux a été cyniquement détourné : il faut placer l’élève au centre du système. Alors les savoirs peuvent bien être négligés, l’élève n’en n’a pas forcément besoin, et la société aussi, on peut bien  se passer de la Princesse de Clèves ou de telle équation mathématique…
Il est temps de réaffirmer que la mission de l’école, c’est la transmission d’un savoir, d’une culture et de méthodes ; C’est par passion pour cette mission que la quasi-totalité des enseignants ont choisi leur métier- et sûrement pas pour le salaire !  Rien n’a été plus démoralisant pour les enseignants que l’impression parfois justifiée que les pouvoirs publics ne considéraient pas cette transmission du savoir comme le plus important
Il est temps aussi de cesser d’alimenter de faux débats, temps de cesser d’opposer défense des disciplines scolaires et pédagogie ; oui bien sûr, l’enseignant qui transmet son savoir doit se placer au niveau de compréhension de l’élève et utiliser toute méthode susceptible de favoriser cette transmission, oui bien sûr, pour l’apprentissage de la lecture comme pour le reste, effort et plaisir ne s’opposent pas mais se complètent, ainsi que l’acquisition progressive d’éléments de plus en plus complexes et la compréhension globale.

Valoriser la culture

Dans un langage qu’on peut ne pas aimer, celui de Jacques Attali,  « Il existe des milliers d’études sur la capital culturel et son impact sur la croissance économique. Toutes vont dans le même sens… L’élévation du niveau culturel d’une population a un impact direct sur son produit intérieur brut. Cette corrélation est permanente et totale » (Le Monde, 10 novembre 2010)
Il semble que nos gouvernants actuels s’acharnent à dévaloriser cette mission de transmission de savoir et de culture. C’est sans doute la première fois que s’étale  à la tête de l’Etat un tel mépris pour l’école et la méritocratie, que ce soit à travers les parcours personnel et familiaux du chef de l’Etat, des déclarations sur l’utilité de la culture ( la fameuse Princesse de Clèves), les propos méprisants envers les chercheurs etc…

Tenir bon sur l’exigence et l’égalité

Dans la même interview du Monde (10 novembre 2010), Jacques Attali tient un propos que je trouve scandaleux : « On ne devrait pas offrir la même chose à Neuilly et en Seine Saint-Denis».
Eh  bien si, on doit bien avoir pour ambition légitime et républicaine d’enseigner les mêmes disciplines à Neuilly et en Seine Saint-Denis, et avec le même degré d’exigence. C’est une justice sociale élémentaire, c’est une exigence vitale pour la société et la nation. Il faut en particulier donner aux  meilleurs élèves des zones les plus défavorisés – et celles-ci couvrent aussi bien certains quartiers de banlieue que certaines campagnes isolées -   la possibilité d’atteindre accomplissement et excellence, dans quelque discipline que ce soit, classique ou technique.
Si cette ambition de résultat doit être la même sur tous, les moyens, eux, doivent être adaptés

Concentrer les efforts sur le primaire

S’il y a un consensus de tous ceux qui s’intéresse à l’éducation, il a été bien résumé par Luc Ferry : quasiment tout se joue dans les premières classes de l’école primaire et ce sont en très grande majorité ceux qui ont eu des difficultés à l’apprentissage des bases de la lecture ou du calcul qui se retrouvent ensuite en perdition et créent des problèmes insolubles. C’est là que pratiquement tout se joue. Les problèmes du collège ne pourront être résolus si celui-ci ne l’est pas (et l’idée de Copé de remettre un examen d’entrée en sixième ne change rien si l’Ecole Primaire ne donne pas à tous une bonne maîtrise des éléments du langage, de l’écriture, de la lecture et du calcul-elle est même démagogique et écoeurante lorsqu’on voit la diminution de la formation des enseignants et des moyens de l’éducation pratiqués par ce gouvernement)
Des réformes simples le permettraient : dédoublement des classes de CP, améliorer la formation des enseignants, adapter le rythme d’acquisition à chaque enfant par des passages plus souples aux cycles suivants,  adapter aussi les méthodes à chaque enfant et en changer en cas de difficultés.
Cet engagement fort dans le Primaire doit devenir une priorité absolue ; et qu’on laisse donc  fonctionner ce qui pour l’instant ne fonctionne pas si mal, notamment les lycées de la voie générale et même la plupart des voies techniques, les classes Prépas, les Grandes Ecoles…

Préparer le Primaire- le rôle de la maternelle

 L’expérience prouve le rôle important de la maternelle dans la préparation au primaire : nombre d’aptitudes indispensables à la lecture et à l’écriture y sont développées, c’est le plus souvent à la maternelle encore que l’envie de lecture  apparaît. L’importance du système des maternelles est un atout historique pour la France que le gouvernement tente stupidement de remettre en cause. La scolarisation entre deux et trois ans doit être encouragé, et l’on doit veiller en particulier à ce que les populations défavorisées y ait accès. La scolarisation en maternelle des populations immigrées doit être éventuellement rendue obligatoire dans le cadre d’une politique volontariste d’intégration

Prendre en compte les différences culturelles ; l’importance du périscolaire

Il s’agissait là d’un sujet  quasiment tabou, jusqu’à la parution du livre salutaire de Lagrange, Le déni des cultures. Un système de pensée politiquement correct proscrivait l’évocation de ce problème  aujourd’hui  fortement lié à l’immigration noire ou maghrébine. Les enseignants voyaient bien que les difficultés se cumulaient dans ces populations, et que ce n’est pas tout à fait la même chose d’enseigner dans des zones à forte densité immigrée, ou encore que les enfants asiatiques ne posaient généralement pas les mêmes problèmes ; mais il leur était interdit de la dire, voire même de le penser ; le problème étant interdit d’exister, il devenait quelque peu difficile de le résoudre.
 Il n’y avait pourtant là rien de bien nouveau. Au cours du siècle précédent, il apparaissait évident que l’investissement scolaire, l’investissement dans les valeurs de l’école n’était pas tout à fait le même dans toutes les régions de France, et il en reste encore quelques traces lorsqu’on compare les résultats au baccalauréat en Bretagne ou en  Alsace à ceux d’autre régions ; ce problème a pour l’essentiel était réglé.
L’importance de l’immigration, en particulier noire et maghrébine et sa concentration en certains endroits a évidemment posé un problème d’une autre ampleur.  Ce problème sera aussi résolu- et les résultats scolaires, presque miraculeux dans les conditions de déni existantes, d’une partie importantes des  jeunes filles maghrébines et maintenant d’une partie de plus en plus importante des garçons permettent d’être optimistes.
On a laissé aux seuls enseignants le soin de résoudre seuls  les problèmes culturels liés à l’immigration, et c’était évidemment impossible. Une partie importante de la solution consiste en un encadrement renforcé du temps périscolaire (approfondissement du cours, activités culturelles, sportives, artistiques), en particulier dans les petites classes, encadrement périscolaire qui devra être assuré par des enseignants volontaires, mais aussi d’autres intervenants: ce ne doit pas être une école bis.
Mentionnons que ce déni de l’importance du défi culturel lié à l’immigration a conduit à des propositions absurdes d’imitation des systèmes scolaires danois, finlandais, suédois etc, systèmes qui ne fonctionnent qu’en raison de l’homogénéité culturelle de ces pays. Lorsque nous seront parvenu à résoudre ce défi, et cela suppose d’abord de ne pas le nier,  notre société en sera plus riche et plus solide
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