Millas
: l’accident de trop et la conduite indécente de la SNCF
Je ne voulais pas au
départ faire ce blog, avec ce titre. Le jeudi 14 décembre 2017, cinq
adolescents, dont le plus jeune avait 11 ans, sont morts dans la collision
entre un car scolaire et un train régional sur un passage à niveau à Millas
(Pyrénées-Orientales). L’accident a fait également dix-neuf blessés graves,
dont 6 au pronostic vital engagé - l’un est mort deux jours après. Et vu la
violence du choc, l’autocar littéralement coupé en deux par le train, c’est un
miracle qu’il n’y en ait pas eu davantage de victimes.
La conductrice du car a
affirmé que les barrières du passage à niveau étaient ouvertes lorsqu’elle s’y
est engagée ; elle était suivie d’un second car, n’avait jamais connu aucun
problème. Il est difficile de ne pas la croire en sa bonne foi. A l’heure actuelle,
la vérité n’est pas connue et les témoignages sont contradictoires. Mais en
réponse à ceux qui évoquaient son éventuelle responsabilité, la SNCF a publié un communiqué extrêmement brutal
qui constitue une véritable intimidation : « La SNCF se déclare choquée par
les accusations particulièrement graves qui viennent d’être formulées à son
encontre (...) sans aucun élément tangible de preuve » mais dans « un but
purement polémique et « cela alors que l’heure est au recueillement et à la
solidarité avec les victimes, leurs familles et leurs proches ».
La
ligne Perpignan Villefranche : dix passages à niveaux sur quatre kilomètres et
des problèmes récurrents de sécurité
Toujours dans l’Indépendant, ces témoignages
multipliés démontrant des problèmes récurrents sur cette voie : Mickaël,
livreur pour une société de Saint-Féliu-d’Avall : Les barrières du passage à
niveau se sont baissées mais elles se sont arrêtées à moitié. Et les feux qui
clignotaient se sont arrêtés. On a eu peur. La dame devant moi est descendue de
sa voiture et je lui ai dit : “Je vais me mettre sur la voie et faire le guet
pour que vous passiez.” On s’est aidé comme ça à tour de rôle mais on n’a pas
traîné pour franchir les rails. Je passe par là deux à trois fois par semaine
et je n’ai jamais vu quelque chose comme ça. C’est très grave. J’ai appelé
aussitôt le 17 pour signaler à la gendarmerie que le passage à niveau était en
panne. Que les voitures pouvaient passer mais qu’on ne savait pas si un train
allait arriver. En fait, aucun train n’est arrivé. Les gendarmes m’ont dit
qu’ils allaient contacter la SNCF pour les avertir ». De son côté, Nicolas
raconte qu’il y a un mois et demi au Soler, « les barrières d’un passage à niveau
ne se sont pas relevées après le passage du train. On était une vingtaine de
véhicules et on a dû faire du zigzag entre les barrières pour passer ».
Enric Balaguer, président
de l'association des usagers de la ligne Perpignan-Villefranche : « Il faut
dire que le retard d'investissement sur les lignes ferroviaires secondaires est
un problème général … Oui, c'est habituel qu'il y ait des incidents, les
problèmes sur les passages à niveau ne sont pas exceptionnels" …"pas
plus tard que la semaine dernière, il y eu un problème. Soit les barrières
restent fermées, soit elles se lèvent, soit les batteries sont volées. Ce sont
des incidents qu'on rencontre souvent et qui font que les trains de cette ligne
ont souvent du retard ou sont annulés.
Donc
des problèmes récurrents mettant en péril la sécurité, mais aussi ce chiffre
incroyable : Sur un linéaire de 4 kilomètres, on ne dénombre pas moins de dix
passages à niveaux »
«
Il faut dire que le retard d'investissement sur les lignes ferroviaires
secondaires est un problème général »
C’est cette phrase du
Président de l’association des usagers locaux qui explique la dégradation des
conditions de transports publics, avec ses cortèges de retards et un manque de fiabilité insupportables, des
usagers traités comme du bétail, et des accidents auxquels il semble que nous
nous habituions de plus en plus-
Avant
M. Pepy, combien de PDG de la SNCF auraient été maintenus à leurs postes après
de telles séries inédites et même jusque-là inenvisageables de
dysfonctionnements et d’accidents mortels ?
Mais il y a aussi que ces
accidents mortels et dysfonctionnements sont les conséquences prévisibles et inéluctables de la politique de
libéralisation des transports ferroviaires. Oui, évidemment, libéralisation et investissements sur les
lignes secondaires sont contradictoires, et il est ahurissant que les
politiques européennes et nationales de
libéralisation ne soient pas radicalement remises en cause comme complètement
contradictoires avec l’exigence de service public et d’accès égal au service
public. Tout comme il est impensable de voir comment les politiques de libéralisations
du rail, après l’échec cuisant de l’Angleterre, et de l’électricité, après
celui de la Californie puissent être encore défendues par ceux qu’il faut bien appeler
de tenants de la secte libérale, du sectarisme devenu inaccessible à l’épreuve
des faits. Nous en sommes tout de même à u point ou SNCF et RATP préfèrent se
faire concurrence pour le tramway de Manchester, les métros de Ryad ou de Doha, ou pire encore, pour les trains de banlieue
de Boston, dont Keolis (SNCF) est sorti vainqueur contre Transdev (RATP),
mais avec un contrat durablement déficitaire !!
De cette folle
destruction libérale du service public ferroviaire, M. Pepy a été l’agent
extrêmement zèlé. Après les dysfonctionnements multiples de Montparnasse, après
Brétigny, la tragedie de Millas est celle de trop. M. Pepy doit assumer ses
responsabilités et être démissionné de ses fonctions, et la politique de libéralisation des
transports ferroviaires abandonnée.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Commentaires
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.