Airbus près de la
catastrophe : enfin ! Enders débarqué
Ca
commençait à prendre vraiment mauvaise tournure, au point que l’on pouvait se
demander si Enders n’était pas un agent américain chargé de détruire Airbus.
Sur deux fronts, sa direction a été catastrophique, celui, bien connu, des affaires
de corruption, celui, moins connu de la recherche.
Action contre la
corruption : une stratégie erratique, une politique de Gribouille
Comme
beaucoup dans ce marché très particulier de l’aviation, Airbus a dans le passé eu
recours à des pratiques et des intermédiaires sans doute contestables. Au
départ, deux marchés étaient particulièrement visés et les justices de
plusieurs pays cherchent à savoir si des consultants rémunérés par Airbus dans
les campagnes de ventes d'avions notamment en Chine et en Turquie ont pu se
rendre coupables de pratiques litigieuses s'apparentant à de la corruption.
Alors Enders et sa direction prirent une décision baroque : s’autodénoncer
auprès des autorités françaises, anglaises, et finalement, et encore plus
problématiques, américaines. Or, on sait combien la loi américaine
anti-corruption et la compétence universelle que s’accordent les juridictions
européennes est devenue une arme massive de destruction des concurrents
étrangers.
En
matière aéronautique militaire, les USA ont mis au point une arme encore plus
terrible, ITAR. Selon la réglementation
ITAR, toute compagnie souhaitant exporter des équipements intégrant des pièces
d'origine américaine de plus de 500.000 dollars doit obtenir des US une licence
ITAR. Or, le précédent British Aerospace montre que ce système peut conduire à
des pénalités extrêmement importantes alors même que le gouvernement US ne
pouvait pas obtenir une condamnation pour corruption en vertu de la FCPA
[législation anti-corruption].
Cette manière de se jeter dans l’eau pour éviter d’être mouillé laisse
songeur. Car, du coup, ce sont des
dizaines de deals remontant jusqu'en 2005 qui vont être passés à la moulinette
des juridictions US. C'est tout un
«ancien monde qui va apparaître» comme le décrit un ex-cadre de la sensible
division Stratégie & Marketing qui pilotait la centaine d'intermédiaires « apporteurs
d’affaires » de par le monde – les commissions sont bien légales, ce sont
les rétrocommissions, qui sont interdites. C’est tout l’ensemble des précieux
intermédiaires commerciaux, l’ensemble du système de négociation des grands
contrats internationaux d’Airbus qui est en train d’être intégralement livré
aux autorités américaines…et à Boeing par la décision personnelle d’Enders. Et
cerise sur le gâteau, preuve de la bêtise sombre, incompréhensible sauf
sabotage voulu, Airbus a décidé de refuser de payer des centaines de
commissions légales, et se trouve poursuivi par ses intermédiaires commerciaux furieux
et d’ors et déjà condamné. L’idée, était semble-t-il de montrer que ces
contrats n’étaient pas problématiques puisque la justice française contraignait
Airbus à les honorer- or, la justice se prononce sur l’existence du contrat
lui-même et ses obligations, pas sur ce qu’il recouvre en réalité.
La communauté française du renseignement avait alerté le gouvernement sur
le risque majeur que représente l’attitude d’Enders pour Airbus et pour les intérêts
nationaux français. Face aux offensives américaines, seule une riposte
européenne résolue et au final, probablement, une prescription sur tous les
contrats anciens pourra empêcher les USA d’utiliser leur hypocrite législation
anti-corruption à l’usage exclusif de leurs concurrents (voir aussi les
conditions du rachat d’Alsthom pour CGE)
La recherche d’Airbus
décapitée
Un autre aspect de la catastrophique gouvernance Enders a fait l’objet d’un
article remarquable dans Marianne (15décembre 2017) (La Silicon Valley à l’assaut de l’avionneur européen). Il s’agit de la décision d’Enders de propulser à la tête
de la recherche d’Airbus un américain de 37 ans, Paul Eremenko, tout juste issu
de la Darpa (l’Agence de recherche du Pentagone !). Pendant qu’ Eremenko communiquait
à fond sur ses projets mirifiques (des hélicoptères à la demande avec Uber, une
plate-forme volante intitulée Vahana), il « désorganisait les problèmes de
recherche véritablement structurant pour l’avenir industriel du groupe comme
proposer un remplaçant dans les prochaines années à l’A 320… Ils ont dépense
des centaines de millions dans un projet de centre de recherches en Californie
alors que ces dernières années, il était toujours très difficile de négocier
nos projets de recherche ».
« Ce qu’Eremko a réussi à faire, c’est casser la recherche chez Airbus
a déclaré Françoise Vallin, déléguée CFE-CGC »- encore une fois, cette montée
en puissance de la contestation chez la très réformiste CFE-CGC a quelque chose
de très significatif que le patronat et le gouvernement devraient prendre en
considération. Et de fait, en 2016, 400 postes d’ingénieurs ont été supprimés,
ce qui a conduit à la fermeture du siège historique de la Recherche et
Développement du groupe à Suresne, centre issu de l’Aérospatiale et de Matra à
l’origine de la plupart des grands problèmes d’avion chez Airbus.
A peine un an après sa nomination à la direction technique du groupe
Airbus, Eremenko, après avoir tout désorganisé, partait pour UTC, un des grands
sous-traitants américain d’Airbus. » Il a eu accès à toute notre
connaissance, et maintenant il s’en va » s’indigne un ingénieur d’Airbus.
En effet, c’est on ne peut plus problématique !
Encore une fois, incompétence, naïveté totale vis-à-vis des USA, ou, plus
grave, sabotage délibéré, la gouvernance Enders a faille détruire Airbus et ses
conséquences les plus graves restent encore à venir. Le président Macron en
était conscient, et avec Merkel, a décidé et finalement réussi à faire partir
un Enders qu’il n’estimait pas beaucoup. Marianne rapporte la scène suivante :
lors du Salon international de l'aéronautique du Bourget. « Emmanuel
Macron arrive sur le tarmac de l'aéroport à bord d'un A400M, l'avion militaire
de transport d'Airbus, et se dirige vers le stand du groupe aéronautique. Là
l'attend Thomas Enders, le PDG allemand. « Bienvenue monsieur le Président »,
lui lance-t-il souriant. Réponse glaciale du chef de l'Etat : « En France,
personne ne me souhaite la bienvenue. Je suis chez moi. »
Alors, le gouvernement Macron
a-t-il une politique industrielle ? Dans le cas d’Airbus, au moins l’intervention
a été claire (et encore serait-il souhaitable
qu’Enders ait des comptes à rendre) et bienvenue, quoique bien tardive. Mais la politique industrielle du gouvernement
Macron se limite-t-elle à des géants de la taille d’Airbus en situation
critique par la faute d’un management fou ou traître ? Pour l’ instant, il semble que la réponse
soit oui, malheureusement.
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