Un léger sentiment d’écœurement
et de colère
Bon,
je vais pas reprendre tout ce blog, juste quelques éléments, comme ça : La
fermeture de Fessenheim entraînera un
surcroît d’émission de GES entre 6 et 12 millions de tonnes équivalent CO2 /
an, du fait du recours aux centrales à gaz et charbon que sa prolongation
aurait permis d’éviter. Fermer Fessenheim =équivaut à relâcher autant de CO2
dans l'atmosphère que de faire voler
chaque jour 24 à 48 Airbus supplémentaires entre Paris et New York (en AR).
Cela
correspond aussi à une fourchette comprise entre 30 et 60 % des émissions de
CO2 de la totalité de la production électrique nationale !!! (20,4 millions de
tonnes de CO2 en 2018 selon le Bilan électrique 2018 du Réseau de transport
d'électricité (RTE)
Fermer
Fessenheim, c’est aussi la nécessité de garder en activité au moins deux
centrales à charbon , Gardanne et Cordemais pour couvrir les pointes.
Fermer
Fessenheim, ce sont des risques sérieux de black out pour l’Alsace, 1.800 MW
d’électricité bas carbone qui vont quitter le territoire alsacien. Le député
Raphaël Schellenberger (LR, Haut Rhin) n’a cesser d’alerter à ce sujet, en vain.
Fermer
Fessenheim, c’est encore la perte de 2000 emplois de haut niveau directement
générés par la centrale,
Fessenheim,
en éoliennes, c’est ça ! En fin pardon,
ça c’est un quart (850 éoliennes sur 4500), réalisés grâce à l’infinie
patience de Laydgeur , qui s’acharne
à nos concocter des trucs un peu visuels sur tweeter. Parce que c’est bien,
même essentiel, de pouvoir se rendre compte des ordres de grandeurs !
Donc, quand le gouvernement
le même jour, annonce un plan anti-gaspillage bannissant les touillettes en plastique
et 140 autres mesures du même acabit, et la programmation de la fermeture de 14
centrales nucléaires, il y a de quoi effectivement pêter un plomb. Elisabeth Borne, Emmanuelle Wargon,
à dégager !
Et quand Macron va faire tout un cirque médiatique autour de la Mer de
Glace, c’est indécent. Fermer Fessenheim, et 14 autres centrales nucléaires, c’est
transformer la Mer de Glace en soupe neigeuse, et bien pire encore…. Alors, c’est
juste un peu écœurant !
Un qui commence aussi visiblement à s’énerver , c’est le très digne et universitaire, et professoral Jacques
Percebois, pilier du site Connaissance
des Energies. Citations :
Sa fermeture ne doit
rien à des conditions de sûreté…et elle coûte très cher.
« La décision de fermer les deux
réacteurs nucléaires de Fessenheim est encore contestée mais
elle est aujourd’hui actée : EDF confirme avoir déposé auprès de l’Autorité de
sûreté nucléaire (ASN) la demande d’abrogation de
l’autorisation d’exploiter la centrale et prévoit d’arrêter les deux réacteurs
de 900 MW chacun en 2020, le premier le 22 février et le second le 30 juin… Le site alsacien est la doyenne des
centrales françaises mais sa fermeture ne doit rien à des considérations de
sûreté (l’ASN avait autorisé la poursuite de l’exploitation du réacteur n°1
pour dix ans en juillet 2011 et avait fait de même pour le réacteur n°2 en
avril 2013). Cette décision est la conséquence d’un choix politique. Cela
peut paraître d’autant plus surprenant que le Conseil de l’Union européenne a
décidé en septembre 2019 de maintenir éligible l’énergie nucléaire dans le
label des investissements « verts », en justifiant cette position par le fait
que le nucléaire est une énergie « décarbonée »…
Le coût « technique » de la régression comptabilise les coûts que
l’opérateur EDF et les autres actionnaires vont supporter du fait d’une fermeture
anticipée de ces deux réacteurs… EDF indique avoir signé en septembre 2019 avec l’État un protocole
d’indemnisation au titre de la fermeture anticipée de la centrale. Ce protocole
prévoit les versements échelonnés sur 4 ans d’environ 400 millions d’euros correspondant à l’anticipation des dépenses liées
à la fermeture (dépenses de post-exploitation, taxes diverses, coûts de
démantèlement et de reconversion du personnel). Il faut dans ce cadre tenir
compte de l’actualisation : ces dépenses auraient dû être engagées dans vingt
ans et le fait de devoir les engager plus tôt a un coût financier pour
l’entreprise.
D’autres indemnités
sont évoquées au titre du manque à gagner pour les kWh qui ne seront pas
produits pendant les 20 ans à venir. Ces indemnités éventuelles seront calculées ex post sur la base des prix
observés sur le marché de gros et en faisant des hypothèses sur le taux
d’utilisation de la centrale. Sur la base d’un prix de gros de l’ordre de 45
€/MWh (chiffre proche des prix observés aujourd’hui et aussi du niveau de
l’ARENH, encore fixé à 42 €/MWh actuellement) et en prenant un taux
d’utilisation de l’ordre de 75%, cela
donnerait un manque à gagner de l’ordre de 4 à 5 milliards d’euros pour
l’opérateur sur les 20 ans (sur la base d’une production de 12 TWh par an,
avec un chiffre d’affaires de l’ordre de 10,8 milliards d’euros sur la période)…
Notons qu’EDF ne sera pas le seul
opérateur à indemniser puisque la centrale est pour partie propriété d’autres
électriciens européens (un consortium suisse et une entreprise allemande)…
Le coût « social » de la régression évalue les impacts macroéconomiques
liés à la fermeture du site, c’est-à-dire les effets que cette fermeture
engendre sur l’économie locale, voire l’économie nationale. Il y a d’abord les
coûts liés aux pertes d’emplois. En plus des emplois directs (agents de la
centrale) et des emplois indirects (employés des sous-traitants) perdus, il
faut estimer les pertes d’emplois induits c’est-à-dire des emplois au sein des
entreprises, commerces et services qui profitaient de l’activité de la centrale
(certains parlent de 1 000 emplois
menacés)…
Une politique
illisible
La fermeture confirmée de la centrale de Fessenheim intervient dans un
contexte particulier, tant les signaux
envoyés par les pouvoirs publics sont contradictoires et difficiles à
interpréter. Selon la PPE, la part du nucléaire dans la production
française d’électricité doit progressivement baisser mais dans le même temps le
gouvernement vient de demander à EDF d’explorer une voie consistant à relancer
la construction de 6 EPR d’ici une quinzaine d’années.
La feuille de route est précise : la construction de chaque paire de
réacteurs sera espacée de 4 ans et les tranches au sein d’une même paire de 18
mois. C’est une bonne décision si l’on veut maintenir les compétences et le
savoir-faire de l’industrie française des réacteurs. Ces EPR2 seront sans doute
moins complexes à construire que celui de Flamanville et, grâce aux économies
d’échelle, leur coût devrait être plus faible.
Ces nouveaux réacteurs, si la décision de les construire est bien
confirmée, vont-ils se substituer à des fermetures programmées ou vont-ils
accélérer la fermeture d’autres réacteurs ? Faut-il s’attendre à un report
de l’échéance 2035 concernant le plafond de 50% de nucléaire dans le mix
électrique? Il est difficile de répondre d’autant que l’avenir de l’EPR va
aussi dépendre de la façon dont les choses vont se passer à Hinkley Point au
Royaume-Uni.
Le gouvernement a le projet de restructurer EDF en scindant l’entreprise en
deux entités (le plan « Hercule »), dont l’une, 100% publique, se
chargerait du nucléaire et de l’hydraulique. Faut-il y voir une façon de « sanctuariser » le nucléaire ou
au contraire la volonté de créer une société en charge de gérer des actifs
considérés comme « échoués » à terme, à l’instar de ce que
l’Allemagne a fait pour ses actifs charbonniers ? Cette entité (qualifiée
de « bleue » dans le plan proposé) serait alors considérée comme une
société de « defeasance » visant à organiser la sortie du
nucléaire.
La mise en veilleuse
en septembre 2019 du projet de
surgénérateur Astrid est une décision majeure, passée un peu inaperçue, dans la mesure
où l’on retarde (certains disent abandonne) le choix d’un réacteur de nouvelle
génération à neutrons rapides qui permet de mieux utiliser l’uranium, d’en
accroître fortement les réserves, et dans le même temps de réduire le volume et
la nature des déchets nucléaires à stocker puisque certains déchets deviennent
des combustibles (cas du plutonium) tandis que d’autres peuvent être transmutés
(cas de certains actinides
mineurs).
C’est certes déjà le cas avec le MOX, qui permet de recycler du plutonium,
mais pas à la même échelle. Pendant ce
temps, les Russes et les Chinois, mais aussi les Américains, continuent de
développer cette voie des surgénérateurs, dans laquelle la France était
pourtant leader (grâce aux réacteurs Rapsodie, Phénix et Superphénix tous aujourd’hui à
l’arrêt).
Certes, les recherches pour la Génération IV continuent « sur le
papier » mais dans le nucléaire,
les retards sont parfois irréversibles et rien ne remplace la construction d’un
prototype. Les retards de Flamanville, en comparaison avec les performances des
deux EPR de Taishan construits en Chine avec l’aide d’EDF, montrent combien la
pratique et le maintien des compétences sont des atouts importants.
Et après Fessenheim ?
Les fausses promesses du technocentre ne seront pas tenues.
Une
politique absurde qui nous coûte un pognon de dingue, une politique illisible,
mais aussi d’énormes mensonges et des promesses non tenues. L’inquiétude est
notamment et justement soulevée par le député de la région Raphaël Schellenberger
dans une tribune de l’Energeek. Extraits :
« La
construction d’un techno-centre installant à Fessenheim une filière de pointe
et d’excellence dans le démantèlement nucléaire devait être le projet phare
de la reconversion économique du territoire, clairement identifié comme tel par
le Ministre François de Rugy en février 2019 lors de son passage en Alsace. Et
pourtant, le gouvernement affiche aujourd’hui son profond scepticisme quant à
cette réalisation alors même qu’il avait toutes les cartes en main pour la
rendre possible.
Envisagée
très tôt, cette idée, venant des écologistes eux-mêmes, était censée rassurer
une région vivement préoccupée par les conséquences économiques néfastes de
l’arrêt des deux réacteurs. La promesse de centaines d’emplois découlant de ces
activités de démantèlement, inscrites à une échelle européenne, constituait la
parade des partisans de la fermeture face à l’impact social de leur combat.
Bien que surévaluée, la portée économique de cette installation devait être
considérée avec responsabilité après la victoire des opposants à l’énergie
nucléaire et l’annonce définitive de la fermeture de la centrale de Fessenheim.
Le
techno-centre constitue effectivement l’occasion de créer des emplois. Certes, avec un zéro en moins, les
projections d’activité permettant d’espérer 150 emplois plutôt que les 1 500
souvent communiqués, mais tout de même…
Mais
voilà, depuis le début, deux conditions bien identifiées sont posées pour
réaliser ce projet : la capacité à
constituer une stratégie franco-allemande et la nécessité de faire évoluer la
réglementation sur les déchets nucléaires.
Ces deux conditions, EDF, qui a étudié le sujet
avec sérieux, les pose depuis deux ans et le début des travaux du comité de
pilotage installé par le gouvernement. Jean-Bernard Levy, PDG d’EDF, les a
rappelées explicitement en réponse à l’une de mes questions lors de son
audition devant la commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale
en décembre dernier. Seule l’action et l’engagement de l’Etat permettraient de
les satisfaire…
Malgré les annonces fièrement
brandies, le gouvernement n’a pas avancé d’un centimètre sur ces points. Nos
deux obstacles demeurent donc et le Ministère en charge semble avoir maintenant
tourné la page du techno-centre alsacien comme l’attestent les mots sur le
sujet d’Elisabeth Borne,
Ministre de la Transition écologique et solidaire, à l’Assemblée nationale le 8
janvier 2020. Circulez, il n’y a rien à voir, le sujet n’est pas porteur….
Tout dans ce dossier
est incohérent. Si la France ne fait pas
évoluer sa règlementation sur les déchets nucléaires, l’une des deux
conditions pour réaliser le projet, nous continuerons à considérer tous les
matériaux issus du démantèlement comme des déchets nucléaires, même s’ils ne
sont ni radioactifs ni contaminés. Il faudra alors les traiter comme tel et les
enfouir ou les stocker de façon définitive. Par contre, nos voisins européens,
qui disposent d’une réglementation adaptée, pourront quant à eux les recycler
et les remettre sur le marché européen des matières. Nous les verrons donc
arriver dans nos biens de consommation. Encore une fois, notre échec serait
double.
« L’exemplarité
promise au territoire de Fessenheim par le gouvernement dans l’accompagnement
de la fermeture de la centrale n’est pas au rendez-vous »
Le technocentre enterré
par Elisabeth Borne
Raphael
Schellenberger et les syndicats, et EDF, et les Français qui voient leur
patrimoine bradé auraient sans doute mieux fait de s’opposer plus fermement à
la fermeture de Fessenheim quand il en était temps plutôt que de croire aux
promesses mêmes maigrelettes, du Technocentre. Car celui-ci semble bel et bien enterré
par Elisabeth Borne. Déclarations (9 janvier 2020, devant la Commission du
développement durable :
« «J’ai eu des échanges avec mes
homologues allemands (…). Je ne peux pas
vous dire qu’il y ait des grands signes d’ouverture de la part de nos voisins
sur l’utilisation d’un technocentre qui supposerait pour eux de déplacer des
déchets nucléaires au-delà de la frontière», a indiqué la ministre. «Et très franchement, ça ne me paraît pas
forcément une piste facilement concrétisable», a-t-elle conclu.
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