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mercredi 29 août 2018

Le modèle suédois, une protection sociale inclusive


Réformes des retraites, conditions de ressources pour les pensions de réversions, plafonnement des indemnités chômage pour les cadres: toutes ces réformes ont en commun de substituer à un système d’assurance profitant à l’ensemble du pays un système de filet de sécurité très minimal. C’est conforme à l’idéologie de la secte libérale au pouvoir, et c'est très intéressant pour ceux qui veulent promouvoir des assurances privées ;  ce n’est pas conforme à une saine compréhension du fonctionnement des sociétés, c’est contraire à la façon dont nous avons bâti l’Etat social en France, basé sur le paritarisme et un système assurentiel qui est un placement différé. Cette conception est contraire aux principes du système de protection sociale à la fois le plus efficace, le plus juste et le mieux adapté aux sociétés européennes, le modèle suédois.

Suède : une forte protection sociale et un pays performant

L’indicateur de « dépenses totales des administrations publiques » en pourcentage du PIB s’établit en moyenne des pays de l’UE‐27 à 46,3%, mais avec une forte dispersion : 54,3% en Suède, 52,7% en France, 51,2% en Danemark, respectivement 34,2% en Estonie, 33, 8 en Irlande, 33,6% en Lituanie. Le modèle suédois a connu une crise importante et la Suède s’est s'engagée dans une réforme radicale de l'Etat pour améliorer l'efficacité de ses interventions. Résultat : la Suède est devenue l'un des pays développés les plus performants, avec un taux de croissance annuel de plus de 3 % en moyenne sur les trois dernières années, et des finances publiques rééquilibrées.
Et les Suédois ont opéré cette transformation tout en demeurant fidèle à l’essentiel des principes de leur protection sociale et  l'un des pays les moins inégalitaires au monde : en 2010, l'indicateur Gini, qui mesure le degré d'équité dans la distribution des revenus après impôts, place la Suède en seconde position mondiale.

Ceci n’est peut-être pas dû au hasard : Le taux de syndicalisation est élevé (80 %) et le taux de couverture par les conventions collectives atteint 90 %. En outre, ces ratios sont restés remarquablement stables malgré les turbulences que l’économie suédoise a connues après 1990.
Eh oui quand on veut faire une politique sociale, il faut des syndicats forts, avec qui l’o négocie ; et, par corollaire, quand on veut faire une politique libérale et anrtiscociale, il faut affaiblir les syndicats et ne pas discuter avec eux.

Et les Suédois ont opéré cette transformation tout en demeurant l'un des pays les moins inégalitaires au monde : en 2010, l'indicateur Gini, qui mesure le degré d'équité dans la distribution des revenus après impôts, place la Suède en seconde position mondiale

Un système inclusif qui prend en compte les classes moyennes : la doctrine Möller

C’est Gustav Möller, ministre des Affaires sociales de 1924 à 1926  puis de 1932 à 1951 quasiment sans interruption qui a façonné la doctrine sociale de la Suède.

Cette doctrine est universaliste :  Son but est de simplifier la gestion de l’aide sociale et oter les stigmates associés à celle-ci, et pour cela faire bénéficier toute le population riches et pauvres de prestations de qualité. L’accent est mis sur le développement de services publics universels plutôt que de développer des prestations en espèces  ( et l’on pourrait traduire aujourd’hui : plutôt que des assurances) :  1) parce que le fait d’offrir des prestations en espèces ne garantit nullement que le marché réponde efficacement à la demande 2) parce que cela ne permet de garantir un même accès et une même qualité de service à toute la population.

Le principe avancé par Möller est  d’offrir des services identiques pour tous mais de qualité élevée afin que ne se développe une demande alternative pour des services privés chez les plus riches.
En incluant pauvres et riches dans un même système de services publics de qualité, il s’agit d’éradiquer les inégalités de traitements liées aux inégalités sociales, non pas en focalisant l’aide sur les plus démunis, mais en s’assurant le soutien des classes moyennes et aisées en les incluant dans des programmes d’assurance et des services publics universels et de qualité.

Ainsi fut décidée la mise en place, à partir des années 50, au sein du système universel d’assurance sociales d’indemnités proportionnelles au revenu pour éviter que les plus aisés ne mettent en place leurs systèmes d’assurances privées. Ce point est essentiel pour comprendre l’Etat providence suédois et sa forte capacité redistributive.  En effet le système repose sur un apparent paradoxe ; au lei de focaliser l’aide sur les plus démunis, l’Etat Providence suédois redistribue les ressources à toute la population, et proportionnellement plus aux plus aisés qu’aux plus démunis.  Pourtant, loin de constituer une dilution des ressources, une telle stratégie permet au contraire une plus forte redistribution et surtout une plus grande égalisation des conditions et des chances, en tirant vers le haut ceux qui sont moins bien dotés.

Ce paradoxe de la redistribution tient au fait qu’en incluant toute la population dans un même système universel généreux, on augmente le consentement des plus riches à contribuer au système, permettant ainsi d’augmenter la masse des ressources à distribuer et de garantir la légitimité du système en donnant la possibilité aux plus démunis de bénéficier non pas simplement d’un filet de sécurité, mais de prestations de qualité qui satisfont également les classes moyennes et aisées.  Pour G. Möller, un tel système universel permet non seulement une plus forte redistribution des ressources, mais offre aussi un meilleur rapport coût-efficacité puisqu’il réduit les coûts élevés liés au contrôle des ressources ainsi que les coûts de gestion associés à des assurances privées multiples.

Ce discours s’oppose radicalement et très consciemment à ceux de la Troisième Voie Blairiste. Pour ceux-là, il s’agit de réduire les sécurités pour promouvoir le changement ; la stratégie suédoise, à l’inverse, met l’accent sur la protection, l’idée est qu’on ne peut promouvoir le changement sans, en même temps, assurer la sécurité des individus, l’insécurité étant perçue comme une source d’inefficacité et comme une entrave à la croissance.

Ces principes de base du système suédois étaient assez proches du système français en terme d’assurance –maladie, de retraite et d’assurance chômage. Ce système universel, juste et efficace est à l’opposé des orientations que prend le gouvernement Macron, plus anglosaxonnes et américaines : un filet de sécurité pour les plus désavantagés, des assurances de luxe très couteuses pour les plus riches, et, entre les deux, des classes moyennes qui se débrouillent comme elles peuvent : soit un système non universel, injuste et inefficace, dont les seuls gagnants seront les assureurs privés.

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