PNGMDR : Plan national de
gestion des matières et déchets radioactifs
PNGDR
qu’es aco : Plan national de
gestion des matières et déchets radioactifs. Et il y a là-dessus un débat organisé par la CNDP (Commission
Nationale du Debat Public) – celle qui a organisé un grand débat ma foi assez
objectif et bien conduit sur la PPE ( loi de Programmation pluriannuelle de
l’Energie) et qui s’est fait recaler du Grand Debat de Macron ( et pour cause,
puisqu’il s’est révélé comme une simple opération de propagande en vue des
Européennes).
Donc
débat il y a sur les déchets nucléaires, avec, selon maintenant une méthode
bien rodée, site internet, documents d’information, cahiers d’acteurs,
contributions citoyennes et aussi débats délocalisés.
Pour
l’un de ces débats, à Lille, ça s’est mal passé. « La réunion publique de
Lille qui s'est tenue fin mai, a été perturbée par certains participants
anti-nucléaire. La commission en a pris acte, et a interrompu la rencontre au
bout d'une heure trente environ, quand les échanges ne pouvaient plus se
dérouler dans des conditions satisfaisantes. Elle regrette cette décision et
invite tous les citoyens à participer au débat public via les différentes
modalités offertes : réunions, site internet etc ; pour exprimer leur point de
vue.
Il
semblerait que les personnes qui ont perturbé la réunion aient répondu à
l'appel de plusieurs collectifs qui considèrent "qu'il n'y pas à débattre tant que les centrales continuent de produire
des déchets]", et qui souhaitaient "qu'aucun discours pro-nucléaire ne puisse s'exprimer" (tract
du réseau Sortir du Nucléaire).
Précisons
que tout au long de la phase de préparation et au cours du débat, la commission
a proposé à ces associations et collectifs d'être présents dans le débat selon
des modalités à discuter…
Belle
démonstration du fanatisme et des conceptions de la démocratie, du refus de
toute rationalité de certains prétendus écologistes. Au moins c’est
clair !
Ceci
dit, si la presse s’est fait l’écho de l’échec de Lille, il a eu d’autres débats, certes passionnés, mais
qui ont pu normalement avoir lieu, à Caen, Cherbourg, Rennes, Valence,
Bordeaux, Strasbourg, Bar Le Duc, Lyon, Rouen…Et qui ont quand même révélé de
grandes ignorances et pas mal de fantasmes.
Le cri d’alarme et position de
Greenpeace (Yannick
Rousselet)
« Nous
faisons face à une saturation de toutes les capacités de stockage. Quel que
soit le type de déchets, tout est saturé. La crise la plus forte est celle des
combustibles usés qu’EDF garde dans les piscines de ses centrales. Elles ne
sont pas destinées à cet usage, notamment pour des questions de sécurité. Elles
sont normalement utilisées pour le refroidissement des combustibles à leur
sortie des réacteurs, mais dans un délai raisonnable. EDF préfère les garder
car cela ne lui coûte rien. Dès que le combustible sort de la centrale, il faut
payer le service à Orano (ex-Areva »).
NB :
une façon un peu partiale de voir les choses : en fait, ce stockage sous
piscine est une étape transitoire incontournable du traitement des déchets….
« La Hague est au bord de la saturation.
Environ 10 000 tonnes de déchets y sont stockées. Sur le papier, elle présente
une capacité de 17 000 tonnes. Mais dans la réalité, des espaces comme les
allées de circulation sont comptabilisés dans ses zones de stockage. On tombe
alors à 11 000 tonnes de capacité. EDF nous annonce la construction d’une
nouvelle piscine de stockage géante à Belleville-sur-Loire (Cher) pour évacuer
ces stocks de La Hague et des centrales. Elle ne sera pas opérationnelle avant
2030. Pendant ce temps-là, à La Hague, ce sont automatiquement 150 tonnes de
déchets supplémentaires qui doivent être stockées chaque année. Pour nous, ce
n’est pas la solution. »
« Il
faut revisiter le dogme français du recyclage puis du stockage en couche
profonde. L’entreposage à sec en subsurface (jusqu’à 30 m de profondeur) est
une voie à étudier. Elle est utilisée en Suisse. Les Belges ont vidé les
piscines de leurs centrales. Orano sait travailler pour cette filière. À la
différence du stockage très profond, elle présente plusieurs avantages. Cette
méthode est beaucoup plus flexible. Elle n’utilise pas d’eau. Et surtout, elle
permet un retour en arrière. Peut-être que des avancées scientifiques nous
permettront de mieux traiter les déchets à haute activité. S’ils sont enfouis à
Cigéo, on ne pourra plus rien faire. »
(NB
c’est faux, voir ci après)
Contributions : les Anciens du
Nucléaire et la CFE-CGC
Sur
le site de la Commission, deux contributions claires qui énoncent bien les
enjeux : une d’un groupe d’anciens du nucléaire, et d’autre part, de la CFE-CGC qui joue bien ici
son rôle de partie prenante légitime à l’intérêt général (que Macron déniait
aux syndicats !). Extraits :
« Le
« Collectif des anciens du nucléaire » rappelle
que l’électricité consommée par une personne pendant 50 années génère seulement
20 kg de déchets radioactifs (dont un peu moins de 500 g de déchets à « vie
longue »). »
« Il souhaite aussi attirer
l’attention sur les conséquences de l’application du principe de précaution
étendue à la gestion des déchets issus de la déconstruction à venir des
réacteurs du parc en exploitation d’EDF. Ce sont principalement des gravats et des déchets
métalliques très faiblement radioactifs, en quantités importantes mais qui ne
présentent aucun risque sanitaire. Ces
déchets sont pourtant considérés comme des déchets radioactifs en se basant sur
la zone d’origine de leur production, faute d’existence d’un seuil de
libération.
La France est semble-t-il le seul
pays européen dans ce cas. C’est d’autant plus étonnant qu’une directive
européenne (2013/59/Euratom) autorise cette libération en fixant les valeurs
d’activité à respecter, reconnues et utilisées par les autres pays européens
nucléarisés. Or,
non seulement cette absence de seuil a pour conséquence la multiplication des
transports et la saturation des sites de stockage, mais elle est clairement
néfaste pour le climat. En effet, recycler l’acier dans un four électrique
alimenté en électricité pratiquement décarbonée, comme c’est le cas en France,
émet très peu de CO2 alors que l’élaboration d’acier de « première fonte » à
partir de la mine émet près d’une tonne de CO2 par tonne d’acier élaboré.
Ainsi, avec la déconstruction prévue des réacteurs d’EDF ce sont plus de 500000
tonnes d’acier qui seront potentiellement concernées par le seuil de libération
en France, ce qui représentera autant de tonnes de CO2 dont les rejets
pourraient être évités… »
« Le
stockage géologique profond choisi pour Cigeo
est la solution la plus sure tant que les solutions de transmutation ne sont
pas disponibles Concernant les déchets les plus actifs (HA) et/ou d’activité
moyenne mais les plus durables (MAVL), la
solution de long terme la plus sûre est le stockage géologique profond dans une
couche argileuse épaisse, étanche et stable depuis des millions d’années pour
au moins deux raisons majeures.
Il offre le plus de garanties
analysables et vérifiables en termes de non-dissémination de matières radioactives dans
l’environnement susceptibles d’atteindre les hommes et les autres êtres
vivants.
Il constitue une protection appelée
à devenir purement passive à terme,
c’est-à-dire sans nécessité d’une intervention humaine, après une phase de possible réversibilité si un procédé de traitement
est un jour mis au point. Cette conclusion est partagée par la France et de
nombreux pays ayant étudié longuement le sujet (Royaume-Uni, Suisse, Suède,
Finlande, Canada, etc.). Ce sera aussi la nôtre dans ce débat…
CFE-CGC :Extraits
Pour
la CFE-CGC, la production d’électricité d’origine nucléaire permet de disposer
d’une source d’énergie décarbonée, pilotable et compétitive. La Programmation
Pluriannuelle de l’Energie prévoit qu’elle demeure, en lien avec le
développement des énergies renouvelables intermittentes, une composante
essentielle de la politique énergétique de la France. Il est donc essentiel de
s’assurer que les déchets et matières radioactives sont pris en charge de
manière sûre, sans conséquences sur la santé ou l’environnement.
La
CFE-CGC considère que le PNGMDR doit être un outil au service de la politique
énergétique française en permettant de s’assurer d’une gestion responsable des
déchets et matières radioactives sur le long terme pour : • garantir la
protection des populations et protéger l’environnement lors des traitements et
manipulations de ces déchets de haute, moyenne, faible et très faible activité
avec des moyens proportionnels aux enjeux et à la dangerosité ; • poursuivre le
retraitement des combustibles usés qui permet à la fois de recycler aujourd’hui
l’équivalent de 10 % des matières du combustible, de constituer un stock de
matières valorisables dans de futurs réacteurs, de préserver ainsi les
ressources naturelles et de réduire la quantité et la dangerosité des déchets
de haute activité ; • promouvoir les emplois existants et à créer en France
liés à la gestion des matières, des déchets... »
Une nouvelle piscine d’entreposage de
combustibles uses est nécessaire.
Le parc nucléaire français actuel utilise de
l’ordre de 1 200 tonnes de combustible par an et il en traite environ 1 100
tonnes dont une partie (environ 100 tonnes) est recyclée sous forme de MOX
(Mixed OXide = Combustible nucléaire constitué d'un mélange d'oxydes de
plutonium provenant du retraitement et d'uranium). Le MOX usé n’étant pas
recyclable dans les réacteurs actuels, il n’est pas retraité, ce qui conduit au
remplissage des capacités d’entreposage disponibles, qui devraient donc être
pleines à l’horizon 2030. Cela implique bien évidemment la création de
nouvelles capacités d’entreposage du fait de l’exploitation du parc nucléaire
français existant, comme le prévoit la Programmation Pluriannuelle de l’Energie
(PPE) et comme le défend la CFE-CGC. L’entreposage du combustible usé en
piscine s’effectue d’abord sur le site de la centrale utilisatrice, puis se
poursuit dans une piscine dédiée avant retraitement. Il s’agit donc d’une étape dans le cycle du combustible nucléaire
destinée au refroidissement des éléments jusqu’à un niveau permettant leur
retraitement. Le retraitement a pour objectif de séparer les produits de
fission des matières recyclables et de réduire la quantité de déchets de haute
activité et ceux de moyenne activité à vie longue . Une solution de type entreposage direct à sec des combustibles usés de
type MOX, mise en avant par plusieurs acteurs, ne peut pas se substituer à un
entreposage sous eau. Compte tenu de leur puissance thermique, qui de plus
décroît lentement, un entreposage prolongé sous eau est nécessaire.
L’entreposage sous eau est maîtrisé sur les plans technique et de sécurité
nucléaire (au sens sûreté et protection des installations) et la construction
d’une nouvelle piscine serait soumise à l’autorisation de l’ASN qui s’assurerait
de la mise en œuvre des meilleures techniques existantes. Toutes ces
techniques, et les compétences associées, sont présentes en France, puisqu’il
s’agit d’activités mises en œuvre de manière opérationnelle au quotidien par
les exploitants nucléaires…. Pour ces raisons, la CFE-CGC soutient le projet de construction d’une nouvelle piscine
d’entreposage de combustibles usés.
Un cadre règlementaire permettant
la valorisation des déchets très faiblement actifs doit être créé
Beaucoup
de déchets sont classés comme
susceptibles d’être radioactifs uniquement sur la base de leur localisation
d’origine, alors qu’ils présentent un niveau de radioactivité nul ou
extrêmement faible, et dans tous les
cas, ne peuvent induire que des expositions non mesurables et très inférieures
aux niveaux d’exposition naturelle. Par ailleurs, de nombreux déchets sont
constitués de métaux qu’il conviendrait de préserver et de valoriser pour
l’avenir au moment où les questions de souveraineté minérale et de préservation
des ressources naturelles se font de plus en plus prégnantes...
Permettre
de développer cette filière, c’est clairement commencer à développer l’économie circulaire des différents métaux, dans un
contexte où celle-ci est au cœur des travaux des différents comités
stratégiques de filière du Conseil National de l’Industrie et où un projet de
loi Economie Circulaire devrait être présenté au Parlement en 2019, dans la
continuité de l’élaboration de la Feuille de Route Economie Circulaire (FREC)
en 2018. Qui plus est, alors que la compétition mondiale s’intensifie pour
l’accès aux ressources minières et que la souveraineté minérale commence à être
intégrée aux réflexions politiques, cette filière de valorisation peut avoir un
intérêt pour l’approvisionnement de l’industrie métallurgique française.
Le
cadre réglementaire et administratif actuel relatif à la gestion des déchets
susceptibles d’être radioactifs restreint un tel recyclage à une utilisation au
sein des installations nucléaires, ce qui constitue une spécificité dans le
paysage européen et mondial… C’est
pourquoi la directive européenne, qui fixe des seuils de « libération » des
déchets radioactifs en dessous d’un niveau garantissant l’absence de
conséquences sanitaires, doit être
réellement mise en œuvre en France pour permettre le traitement des déchets
et la valorisation des matériaux traités, a minima métalliques…
Le projet Cigeo doit se poursuivre
pour garantir une solution aux générations suivantes
Les
déchets nucléaires ne représentent qu’une infime portion des déchets produits
par l’homme (2 kg de déchets radioactifs
par an et par habitant en France) et pour les gérer de manière sûre, des
solutions industrielles sont d’ores et déjà mises en œuvre quotidiennement. Les
déchets de haute et moyenne activité à vie longue ne représentent que 3 % des
déchets nucléaires mais concentrent plus de 99 % de la radioactivité. Pour ces
déchets, la solution industrielle disponible (traitement à La Hague puis
entreposage) permet de garantir l’absence de risque pour la santé et
l’environnement sur une période de l’ordre du siècle. Cependant, certains
éléments contenus dans ces déchets ont une décroissance lente, nécessitant un
confinement sur une période de plusieurs milliers d’années. Plutôt que de
reporter cette question de gestion au-delà du siècle aux générations futures,
la représentation nationale a fait le choix en 2006 de développer une solution
capable de prendre en charge ces déchets sur des échelles de temps «
géologiques ». Cette solution à l’étude
depuis presque 30 ans, c’est CIGEO : le stockage géologique en couche profonde…
La
Loi n° 2006-739 du 28 juin 2006 relative à la gestion durable des matières et
déchets radioactifs a conclu qu’il s’agit d’une
solution sûre et passive sur le long terme qui évite d’en transmettre la charge
aux générations futures : elle devient la solution de référence. Les
différentes études menées depuis, en France comme à l’étranger, confortent ce
choix…L’ASN a reconnu la qualité et la robustesse du dossier présenté. Les
questions posées par l’ASN sur le risque d’incendie lié au stockage des déchets
bitumés ne remettent en rien en question ces qualités fondamentales ni la
pertinence du stockage géologique profond dans l’argile…
De
plus, la réversibilité du projet CIGEO qui consiste à proposer une solution de
long terme tout en se gardant la possibilité sur plus d’un siècle de s’adapter
et de récupérer les déchets si une meilleure solution était trouvée doit être
conservée… Pour toutes ces raisons, la
CFE-CGC réaffirme son plein soutien au projet CIGEO en s’appuyant sur les
fondements et arguments des choix techniques réalisés, et demande que la
réalisation des ouvrages soit engagée sans plus attendre pour participer à la
pérennisation des compétences d’une filière industrielle intégrée et
responsable, forte de plus de 200 000 salariés »
Un
débat nécessaire
Dans
les sondages d’opinion sur l’énergie nucléaire, le thème du devenir des déchets
nucléaires et du « cadeau empoisonné » fait aux futures générations est
récurrent. C’est en fait l’un des principaux arguments des écologistes
défavorables au nucléaire (il y en a des favorables !), entendons l’un des
principaux arguments sérieux auxquels faut répondre ! Ce débat sur le PNGMDR
répond à cette préoccupation légitime, il est nécessaire et utile. Les
écologistes partisans du démantèlement des centrales peuvent d’ailleurs
difficilement s’en désintéresser… et certains ont choisi d’y participer.
Il a le mérite de montrer
l’existence de solutions techniques sûres et acceptables, selon les différents
types de déchet.
Construction d’une piscine supplémentaire, nécessité d’adopter la directive
européenne (« seuil de libération ») sur le retraitement des déchets
non ou très faiblement (inférieurs à la radioactivité naturelle), enfouissement
en argile profonde avec réversibilité partielle semblent faire consensus chez
les experts.
Il
restera à trouver le courage politique de les mettre en œuvre.
N.B. : sur ce sujet comme sur les autres, ne pas hésiter à consulter les threads twitter de Tristan Kamin. : @ Tristankamin
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