Viv(r)e la recherche se propose de rassembler des témoignages, réflexions et propositions sur la recherche, le développement, l'innovation et la culture



Rechercher dans ce blog

mercredi 7 décembre 2016

Liberté du Net

Extension du délit d’entrave à l’avortement : malavisé et dangereux

La majorité présidentielle à l’Assemblée vient, sur l’initiative du gouvernement de voter une extension du délit d’entraves à l’avortement. Il s’agit de lutter contre les sites Internet qui, sous couvert d’information, usurpant parfois l’aspect d’un site officiel,  culpabilisent et parfois désinforment les femmes qui cherche des renseignements sur internet- et qui se sont si bien débrouillés qu’ils figurent parmi dans les premiers résultats des moteurs de recherche.

Le délit d’entrave à l’avortement a été créé pour empêcher les manifestations bloquant les centres d’avortement qui se multipliaient. Pour déplaisante que soit la propagande sur le net des anti-avortements, il y a tout de même quelque abus à l’assimiler à une entrave. Si des renseignements faux sont donnés sur les sites, si des femmes sont sciemment trompées, il est possible de trouver d’autres motifs de poursuites juridiques. Il est aussi assez étrange que le gouvernement n’ai pas trouvé le moyen d’informer sur ces sites et de mieux positionner les sites officiels.  Les possibilités d’avorter sont beaucoup plus remises en causes par la manière dont  les pouvoirs publics ont laissé péricliter les centres d’avortement, le manque de moyen et de personnels. Bref, une démarche bien hasardeuse pour un résultat catastrophique : la gauche apparait hostile à la liberté d’expression sur le net.

Ce qui un comble ; car pendant ce temps, dans une discrétion relative,  la droite  a fait passer au Sénat un projet extrêmement répressif concernant le secret des affaires, et qui provoque l’inquiétude et l’indignation des syndicats de journalistes.

Egalité et citoyenneté !!! une arme de destruction massive contre la liberté d’expression

Comble de cynisme, ce cavalier scélérat se niche dans un vaste projet gentiment  intitulé Egalité et citoyenneté. Il s’agit d’un amendement destiné à permettre à des sociétés  d’attaquer en justice un média non seulement sur le terrain du droit de la presse, comme c’est le cas aujourd’hui via la loi de 1881, mais aussi sur celui de la responsabilité civile, notamment par les articles 1382 et 1383 du code civil. Cette situation, qui  existait en jurisprudence, dans les années 2000, avait par exemple donné lieu à une centaine de procédures lancées par Intermarché contre le magazine Capital ; des affaires remportées par le groupe Prisma presse mais au prix fort : il n’y a plus eu de papier sur ce géant de l’agro-alimentaire. « La menace financière liée à des procès est très efficace même si le média l’emporte », 

Cela rend impossible le travail des journalistes économiques : en cas de projet de plan social contesté, de lancement d’une contre OPA à la suite d’un papier, de préjudice lié à la baisse d’un cours de bourse, leur media pourrait être mis en cause sur le fondement des dommages qu’il aurait causés et condamné à de lourdes et arbitraires pénalités financières en responsabilité civile. Et c’est aussi la fin de la liberté des blogueurs, qui, au moindre propos imprudent, pourront être poursuivis. C’est aussi, contrairement aux engagements pris, non seulement pas la protection promise aux lanceurs d’alerté, mais même l’exact contraire : face aux menaces financières, ils seront réduits au silence !

Et ceci explique la mobilisation des associations de journalistes qui appellent à la mobilisation contre ce texte (Société des journalistes, des rédacteurs, des personnels de : AFP- BFMTV – Challenges – Elephant & Cie – Europe1 – France 2 – France 24 – France Inter – Franceinfo.fr – i-Télé – L’Express – L’Humanité – L’Obs – LCP – Le Figaro – Le Monde – Le Parisien-Aujourd’hui En France – Le Point – Le Télégramme – Libération – Marianne – Mediapart – Midi-Libre – Première Lignes – RFI – RTL –Sud-Ouest – Télérama – TF1, Associations de journalistes : AEF – Association de la presse judiciaire – Association des journalistes de l’information sociale – Association des journalistes de la sécurité – Association des journalistes économiques et financiers – Association des journalistes européens – Association des journalistes scientifiques de la presse d’information – Journalistes écrivains pour la nature et l’environnement) et qui ont signé un appel dans Le Monde : 

« Pour notre démocratie, sauvons notre liberté d’expression et d’information ! Scandale du Mediator, affaire Kerviel, LuxLeaks… toutes ces révélations contribuent à servir un droit fondamental, celui de la liberté d’expression et d’information. Elles alimentent le débat démocratique grâce à une loi équilibrée qui date de 1881, toujours d’actualité. Cette loi, qui protège tous les citoyens et pas seulement la presse, est ébranlée sur plusieurs fronts.
Dans une grande précipitation, et sans concertation aucune, le Sénat offre à ceux qui s’en saisiront des armes de destruction massive contre la liberté d’expression.
Sans débat démocratique digne de ce nom, la Chambre haute a voté sans sourciller des dispositions liberticides dans un projet de loi pourtant appelé « Egalité et citoyenneté ». Un comble ! N’importe qui pourrait ainsi être mis en cause sur le terrain de la responsabilité civile, avec à la clé un risque de devoir payer des dommages et intérêts, parce qu’il aurait par exemple tenu des propos qui dérangent. »

Face à ces projets scélérats, je ne peux que rappeler le vieux slogan positiviste : « Liberté, liberté totale d’exposition, de discussion d’appréciation » ; ce qui bien entendu ne signifie pas liberté de diffamer, de tromper,  ou d’appeler à la violence, qui relèvent des lois sur la presse.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Commentaires

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.