Fessenheim
pas fermé !
Malgré la pression mise par
Ségolène Royal, le gouvernement ne pourra pas lancer le processus de fermeture
de la centrale. Le processus de fermeture de la centrale de Fessenheim
(Haut-Rhin) ne sera pas lancé avant la fin du mandat de François Hollande,
comme le souhaitaient le président de la République et surtout sa ministre de
l'Énergie. Ségolène Royal a perdu son bras de fer, au terme du conseil d'administration
sous très haute tension qui s'est déroulé jeudi après-midi au siège d'EDF,
avenue de Wagram à Paris. La réunion a été longue, houleuse même selon
plusieurs sources du dossier. Elle a mis fin à quarante-huit heures d'un
inutile bras de fer, puisqu'elle s'est conclue sur un compromis de façade qui
était sur la table dès lundi mais que le gouvernement avait initialement
refusé.
Les administrateurs ont voté le
principe de la fermeture de Fessenheim. Ce qui permet à la ministre de saluer
«enfin une bonne décision», qu'elle entend acter «juridiquement dans les
prochains jours». Mais ils ont assorti cette décision de conditions telles que
la fermeture reste assez incertaine : d'
une part, Fessenheim ne s'arrêtera qu'au moment de l'entrée en service de l'EPR
de Flamanville 3, dont EDF prévoit le raccordement au réseau fin 2018. Surtout,
la fermeture de la centrale alsacienne devra être nécessaire pour respecter le
plafond, prévu dans la loi de transition énergétique, de la capacité de
production nucléaire à son niveau actuel.
Ainsi, si d'autres réacteurs du
parc EDF devaient être déclarés inaptes au service, Fessenheim pourrait donc
sauver la mise. Ce qui n'est pas une hypothèse d'école, au vu des inspections
en cours par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) sur plusieurs installations,
comme à Paluel, ainsi que sur la cuve de Flamanville qui attend un feu vert cet
été.
À l'arrivée, la fermeture de
Fessenheim ne sera «irréversible» que si les conditions précitées sont
remplies, a précisé EDF jeudi soir dans un communiqué. Auquel cas l'entreprise
adressera une demande d'abrogation d'exploitation du site alsacien «dans les
six mois précédant la mise en service de l'EPR de Flamanville 3».
Ségolène Royal a fait semblant de
se réjouir et s’est dépêché de faire signer un décret dont elle a fait semblant
de croire qu’il s’agissait d’une "formidable avancée". Le texte du
décret le rend pourtant extraordinairement fragile étant donné les conditions
ci-dessus qu’il entérine et notamment, contrairement à ce que voulait le
ministre, renonce à fermer Fessenheim
"à l'échéance prévue" de 2018
Résistance
des administrateurs indépendants, des syndicats et du management
Les administrateurs indépendants,
justement garants de l'intérêt social de l'entreprise face à l'actionnaire
majoritaire d'EDF qu'est l'État, n'en avaient manifestement pas la même
conception que la ministre. La ministre avait mis une forte pression, en
appelant à la responsabilité de chacun des administrateurs, au point peut-être
d'en braquer davantage certains. Une source proche du dossier dénonçait jeudi
une pression «inacceptable». En réalité, les administrateurs indépendants n'ont
jamais eu la moindre velléité de voter en faveur de la fermeture sans
conditions de l'installation et l'ont répété, par oral, en début de conseil
jeudi. Depuis le début, ils s'insurgent contre le calendrier, jugeant qu'une
décision aussi structurante pour l'avenir de l'entreprise ne peut pas être
prise quelques semaines avant les élections présidentielles et législatives.
Certains d'entre eux considèrent que l'arrêt de Fessenheim, s'il est décidé
brutalement et malgré le protocole d'indemnisation qui a été conclu, risque de
fragiliser le modèle industriel de l'entreprise.
Bravo donc aux administrateurs, aux
syndicats, au management qui a fait prévaloir l’intérêt de l’entreprise et des
français sur une décision politicienne destinée à un quarteron d’écologistes.
Et les syndicats sont bien décidés à continuer à veiller : Laurent Raynaud, de
la Fédération CGT Mines Énergie, prévient : «La bataille de Fessenheim va
continuer. Nous sommes à l'aube d'un scrutin présidentiel et les positions des
différents candidats vis-à-vis de la fermeture méritent d'être clarifiées.»
François Fillon et Marine Le Pen se sont prononcés pour le maintien de la
centrale, contre, Hamon et Mélenchon ainsi que Macron- qui, dans un balancement
très macronien pr&étend cependant défendre la filière nucléaire
2050
: quelles énergies pour nos enfants ? (Pierre Papon, Le Pommier, 2017)
Pourtant, il fut un temps
(lorsqu’ils ne recherchaient pas désespérément les voix des écologistes les
plus radicaux) où pratiquement tous les
socialistes soutenaient le nucléaire comme nécessaire d‘indépendance énergétique de la France et
énergie décarbonée, la seule à même pour des dizaines d’année encore de
permettre à nos sociétés tout simplement de vivre toit en luttant contre le
réchauffement climatique. Peut en témoigner Pierre Papon, ex-professeur de
thermodynamique à l’ESPCI, ancien directeur général du CNRS et ex-Pdg de
l’IFREMER, qui vient de publier (au Pommier) un nouvel essai : « 2050 : quelles
énergies pour nos enfants ? »
Extraits
:
Quels sont les principaux enjeux
énergétiques qui sont devant nous ?
J’identifie trois défis. Le premier
est l’accès équitable à l’énergie pour tous les habitants de la planète. Il y a
environ un 1,3 milliard personnes qui n’ont pas l’électricité, 2,5 milliards
qui ont une énergie frustre et polluante pour leurs moyens domestiques. Ne pas
répondre aux besoins de tous les habitants est un facteur, à terme,
déstabilisant pour l’équilibre du monde, en particulier en Afrique et en Asie
avec des perspectives de développement démographique importantes qui peuvent
aboutir à des crises sociales, économiques et internationales et à des
mouvements de migration.
Le deuxième enjeu, qui est assez
évident même s’il reste des climato sceptiques, est le réchauffement
climatique. Le troisième défi est plus modéré : la disponibilité des ressources
énergétiques.
De nombreux scénarios prévoient un
fort développement de l’énergie nucléaire à l’échelle mondiale.
Quel
est, selon-vous, l’avenir de la filière ?
Après les évènements type
Fukushima, l’avenir passe avant tout par les moyens de sûreté des réacteurs
actuels et ceux à construire.
Ensuite, je pars d’un constat :
l’énergie nucléaire est incontestablement un moyen pour limiter les émissions
de gaz à effet de serre, et, pour la plupart des pays, dont la France, un moyen
d’assurer l’indépendance énergétique du pays même si nous devons importer
l’uranium. Problème : c’est une énergie très capitalistique et les arbitrages à
venir sur la production d’électricité sur les différentes filières seront à
faire sur le coût du kilowattheure. Je pense que le nucléaire, du coup, peut
rebondir avec d’autres filières qui seraient moins chères et plus sûres comme
celle supposée au thorium qui produirait moins de déchets.
Ma
position sur le cas de la France est pragmatique. Il faut faire feu de tout
bois. Un pays comme la France, qui a les capacités techniques et industrielles
de faire du nucléaire, aurait tort de s’en priver, bien entendu en vérifiant que les
conditions de sûreté des réacteurs soient très claires.
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