La
dérégulation augmente la flexibilité et fait décroitre le chômage Fake !
Trois études du
FMI sont souvent citées en faveur des politiques de dérégulation du marché du
travail. En observant un ensemble de 97 pays entre 1980 et 2008, Lorenzo
Bernal-Verdugo, Davide Furceri et Dominique Guillaume ont suggéré que les gains
dans la flexibilité du marché du travail se traduisent par une baisse du
chômage total, du chômage des jeunes et du chômage de longue durée. Parmi les
différents indicateurs de flexibilité du marché du travail qu’ils observent,
les coûts d’embauche et les règles d’embauche et de licenciement semblent être
les plus importants. Bernal-Verdugo et alii(2012b) constatent que les crises
financières ont un impact largement négatif à court terme, mais ils suggèrent
également que cet effet disparaît rapidement dans les pays disposant
d’institutions du marché du travail flexibles, tandis que l’impact des crises
financières est moins prononcé mais plus persistant dans les pays caractérisés
par des institutions du marché du travail plus rigides. Enfin, à partir d’un
échantillon de 167 pays pour la période s’écoulant de 1991 à 2009, Ernesto
Crivelli, Davide Furceri et Joël Toujas-Bernaté (2012) suggèrent que les
politiques structurelles visant à accroître la flexibilité des marchés du
travail et des produits et à réduire la taille du gouvernement ont un impact
fortement positif sur les élasticités de l’emploi : la dérégulation enrichirait
la croissance en emplois.
Or ces études ont
été sévèrement critiquées et même réduites à néant par une économiste
expérimentée de l’OIT, Mariya Aleksynska (Deregulating
labour markets: How robust is the analysis of recent IMF working papers? »,
Organisation internationale du travail, conditions of work and employment
series, n° 47., 2014). Elle montre en particulier que les études s’appuient
sur des données et un index de la Banque mondiale (World Bank Employing Workers
Index (EWI)) qui est tellement douteux que celle-ci l’a retiré et a demandé qu’il
ne soit plus utilisé ! (La Banque
mondiale a demandé à son personnel de
cesser d’ « inclure des recommandations fondées sur l’EWI « dans
tous ses travaux et de refuser toute
nouvelle demande d’assistance technique sur les réformes du marché du travail basées
sur l’EWI, ainsi que suspendre le débat politique en cours avec les
gouvernements clients sur les réformes du travail fondées sur l’EWI »). On
a rarement vu pareille et si douloureuse autocritique ! Soumis à une
batterie d’experts, ceux-ci ont conclu que l’EWI reflète « les coûts de
réglementation du marché du travail et pas les bénéfices » et constaté qu’une approche plus globale était
nécessaire.
Qui plus est, partant de données reconnues
inadéquates qui contenaient déjà la conclusion à laquelle ils voulaient arriver
( justifier les politiques d’austérité de de dérèglementation du FMI), les
économistes du FMI les ont mal agrégées, : sur six critères théoriquement
indépendant, la régulation des embauches et des licenciements figurait trois
fois sous diverses formes, ce qui renforçait encore son importance. Enfin et
surtout, les études du FMI ont utilisé des ruptures de tendance dans les séries
de données pour identifier les réformes, or celles-ci étaient très souvent souvent dues à des
changements de méthodologie statistique ! Une fois ces ruptures méthodologiques prises
en compte, la majorité des réformes identifiées par les économistes du FMI ne
peuvent simplement être répliquées 45
sur 53 sont invalidées !)
Bref, il ne reste
rien de l’argument selon lequel, en période de crise, la dérégulation du
travail fait baisser le chômage. Rien ! Nada ! Et une fois de plus,
les économistes du FMI peuvent préparer un sérieux mea culpa !
La protection de l’emploi et le niveau d’indemnisation
du chômage sont défavorables à l’emploi Fake !
Les employeurs
auraient « peur d’embaucher » parce qu’il serait ensuite trop difficile ou
coûteux de licencier, et qu’ils auraient donc à payer des salariés dont ils n’auraient
plus besoin. Les économistes libéraux se sont échinés à démontrer que les rigidités du marché du travail sont
défavorables à l’emploi. Ils utilisent les indicateurs de « protection de
l'emploi » (EPL : employment protection legislation) calculés par l’OCDE. Eh
bien, même en utilisant ces indicateurs baisés qui suggèrent déjà que la
protection de l’emploi serait par nature néfaste, de même d’ailleurs qu’une
indemnisation trop « généreuse » du chômage, la démonstration est loin d’être
convaincante comme le montre la courbe ci-dessous : il n’existe aucune liaison
entre la rigidité du marché du travail ainsi mesurée et la variation du taux
d’emploi (la proportion de la population en âge de travailler qui occupe un
emploi) entre 2007 et 2014.
Des pays supposés
« rigides » comme la France ou la Belgique ont des résultats analogues à ceux de
pays très « flexibles » comme la Nouvelle-Zélande, lesEtats-Unis ou le Canada.
En sens inverse, des pays dont le degré de « rigidité »est comparable peuvent
avoir de bonnes performances (Pologne, Allemagne) ou de très mauvaises
(Espagne, Grèce). on obtiendrait le même genre de graphique par tirage au sort.
NB : ces derniers
graphiques et argument sont tirés de l’excellent blog de Michel Husson –Hussonet) (http://hussonet.free.fr/euroflx.pdf)
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