Marjolaine Meynier Millefert, (LREM), rapporteur de la
Commission d’enquête parlementaire sur les énergies renouvelables et la
transition énergétique présidée par le député Julien Aubert (2019):
« Quand on a 80 % des gens qui vous disent que le
développement des ENR électriques en France soutient la décarbonation et
finalement la transition écologique en France, je pense que ce n’est pas bon
non plus parce que le jour où les gens vont vraiment comprendre que cette
transition énergétique ne sert pas la transition écologique vous aurez une
réaction de rejet de ces politiques en disant vous nous avez menti en
fait. »
Déposition devant la Commission Aubert de M. Pascal
Poncet maire de Saint-Just en Chevalet (Loire), Extraits.
Recettes pour une bonne margoulinade 1) des structures de financement changeantes
« Un projet est né dans les années 2007-2008 portant, initialement,
sur une trentaine d’éoliennes, qui ont été ramenées à cinq, dans la commune de
La Tuilière, et à quatre dans la commune de Cherier. Soit un projet de neuf
éoliennes d’une puissance de 2,5 mégawatts et d’une hauteur de 155 mètres.
Ces neuf éoliennes font partie du projet Éole 76, rapidement racheté par la
société Énergie du Portugal renouvelable (EDPR). Je vous dirai pourquoi, après
avoir recueilli différentes informations, j’ai peu à peu changé ma posture et
mon opinion sur cette affaire.
Le projet Éole 76 a donc été racheté par EDPR avec des fonds très
importants en provenance de Chine, du Qatar et, me semble-t-il, d’Arabie
Saoudite. Les fonds chinois proviennent de la société qui a réalisé le barrage
des Trois-Gorges, en Chine. Un barrage qui a fait l’objet de nombreuses
critiques s’agissant du déplacement des populations et des 600 km2 d’emprises
agricoles. Le projet Éole 76 est aujourd’hui porté par la société les Monts de
la Madeleine Énergie, qui fait presque office de faux-nez. »
Recettes pour une bonne margoulinade 2) le coup du mépris !
« Initialement, j’étais curieux face à ce projet et j’avais adopté une
posture du « pourquoi pas ». Je me suis rendu aux réunions publiques
– deux me semble-t-il – organisées par le promoteur. Là, j’ai été frappé par la légèreté avec laquelle le projet nous était
présenté. J’avais l’impression de me retrouver en CM1 ou CM2 ! Le
promoteur nous a en effet présenté un projet qui tenait sur des feuilles A3 que
je n’arrivais à voir qu’en me tordant ; de temps en temps, j’apercevais un
morceau d’éolienne dans le blanc des nuages. J’ai, bien entendu, trouvé la
méthode critiquable, notamment s’agissant de la transparence du dossier. D’autant
que j’avais, demandé aux représentants du projet qu’une réelle communication
soit menée – au motif que nous étions une commune limitrophe, une station
verte, que nous développions une politique modeste mais efficace en matière de
tourisme – et qu’une maquette soit réalisée ; en guise de maquette, nous
avons eu la réunion telle que je viens de vous la décrire. En tant qu’élu de la République, même si mon territoire est modeste, je
pense mériter d’être traité d’une autre manière. Mes doutes se sont donc amplifiés. »
« La suffisance du promoteur n’était pas supportable :
« Croyez-nous, nous sommes les sachants, nous allons venir vous faire du
bien… » Depuis l’implantation du premier parc, aucun emploi n’a été créé,
nous ne faisons que regarder les éoliennes tourner. »
Recettes pour une bonne margoulinade 3) surtout pas de bilan des
expériences précédentes !
« Je ne comprenais pas pourquoi
le développeur n’avait pas eu l’idée de faire le bilan du parc éolien, implanté
trois ans auparavant, à quatre kilomètres de notre site. Il aurait ainsi pu
avoir une ambiance globale de ce qui se passe au niveau du vent. Non, il a
préféré planter un mât de mesure. Un mât qui, pour la petite histoire, est
tombé quelques mois plus tard. Une enquête a été diligentée, mais nous n’avons
jamais su qui avait fait tomber le mât – ce n’est pas moi. Une façon de faire
qui a renforcé mes doutes.
De mon côté, je me suis procuré les résultats du parc existant ; des
résultats catastrophiques. Si je n’ai aucun moyen de m’assurer de la véracité
de ces résultats, bien entendu, je pense qu’il s’agit des vrais résultats. J’ai
contacté le maire de la commune voisine, qui, après une période de doutes, est
aujourd’hui radicalement opposé au projet. Il m’a confirmé que tous ceux qui
avaient accueilli ce projet s’en mordaient aujourd’hui les doigts.
Ce même maire m’a raconté que des journalistes de France culture étaient
venus l’interviewer sur l’éolien, et que ce jour-là des techniciens étaient en
train de démonter les pales pour poser des résistances électriques, car à cette
altitude, la glace qui se formait était de nature à gêner le bon fonctionnement
– quand elle fonctionnait – de l’éolienne. Si nous devons produire de l’énergie
pour chauffer les pales, où allons-nous !
J’ai également interrogé les personnes habitants près des éoliennes. Nous
sommes bien loin de la vérité, bien loin des propos du promoteur, tant sur le
plan sonore que visuel – ces personnes vivent avec ces mâts 24 heures sur
24. Une photo n’est qu’une photo, dans
la réalité, les éoliennes bougent et captent votre attention en permanence.
Les habitants ont l’impression, quand
ils sortent de chez eux, de se trouver sur un autre territoire, en tout cas pas
celui qu’ils ont choisi initialement…
Le rendement du parc existant –nous aurions pu le communiquer au promoteur,
la topographie, le relief étant identiques. Les responsables ont refusé de nous
communiquer les résultats. Mais il est simple de calculer le nombre de
kilowatts produits : il s’agit du chiffre d’affaires divisé par le prix du
kilowatt.M. le président Julien Aubert. Pouvez-vous nous
transmettre ces informations ?M. Pascal Poncet. Les
informations que j’ai recueillies ne sont pas officielles, mais l’écart entre
ce qui était annoncé et la réalité est de 80 %, voire 100 %.
Recettes pour une bonne margoulinade 4) Bien choisir ses victimes, de
préférences fragiles !
« Les habitants de
notre région, comme cela est indiqué dans des études de l’Institut national de
la statistique et des études économiques (INSEE), perçoivent de petites
retraites – de 700 à 900 euros. J’ai compris que le promoteur avait choisi
ce territoire pour sa docilité et non pour la performance du vent ou pour des
motifs écologiques. D’ailleurs, quand nous analysons le passé des
investisseurs en ce domaine, nous pouvons légitiment nous interroger. Et les
résultats que j’ai récupérés ici et là démontrent que le rendement ne serait
pas des meilleurs. »
« Le promoteur a choisi un territoire docile, avec une opposition
passive. Les habitants s’interrogent sur ce que vont devenir leurs biens. Car
la moins-value est bien réelle. Et les notaires ne font que la confirmer. Si
les projets éoliens n’avaient aucune incidence sur la vie d’une région, nous ne
serions pas aussi attentifs.Par ailleurs, et c’est mathématique, si, par
exemple, 50 % des personnes sont défavorables à un projet, vous vous
privez forcément de 50 % d’acquéreurs potentiels. »
« Pour la petite histoire, le promoteur n’a pas démarché la baronne de
Rochetaillée, il n’avait aucune chance ! Non, la cible était cette
population que je viens de vous décrire. Et je comprends parfaitement qu’elle
soit intéressée par ces fameux 600 ou 700 euros par mois. »
« Ce projet a clivé la population, dans une période où nous n’en
avions pas besoin – mais vraiment pas besoin. Preuve en est les mouvements que
nous avons connus. Tous les jours, j’appose des pansements sur les blessures
des uns et des autres. Je vous garantis, comme tous les élus de proximité, que
j’ai senti les choses arriver.
Pourquoi ? Parce que parmi les personnes favorables au projet, se
trouvaient celles qui avaient été ciblées comme « dociles » ou
percevant une petite retraite. En leur proposant de doubler leur retraite – par
un dédommagement, par exemple, de 600 ou 700 euros par mois pour
l’implantation d’un mât, de 300 euros pour un survol de pales ou de
150 euros pour une tranchée sur leur propriété –, le promoteur a perturbé
l’équilibre de notre population.
Le pire, car il y a pire, ce sont les personnes qui ne toucheront pas ces
fameux 600 euros par mois, car, manque de pot, le mât sera implanté, non
pas chez eux, mais juste à côté. Leur terrain en sera dévalué et elles ne
seront pas indemnisées. Une injustice que je ne peux admettre, en tant que
maire »
L’éolien ou le tourisme,
il faut choisir !
M. Pascal Poncet explique ensuite comment il a dû renoncer à un projet
touristique porté par Pierres et Vacances en citant une lettre du
promoteur :
« Madame la préfète, je suis
porteur d’un projet Pierre et Vacances, au lieu-dit la Condamime,
Saint-Just-en-Chevalet. Je suis propriétaire de bâtiments et de plusieurs
hectares qui intéressent ce spécialiste du tourisme convaincu, comme moi, du
potentiel de cette région… ». Notre territoire est en effet appelé la
Petite Suisse, il possède de nombreux atouts et nos efforts portent aujourd’hui
leurs fruits. Le bassin de vie que je vous ai présenté en introduction est
d’une extrême précarité, mais fonctionne bien.
Je continue la lecture du courrier : « Le canton et ses environs
pourraient ainsi bénéficier d’une dynamique économique intéressante, construite
autour de son image de nature préservée. Hélas, je viens d’apprendre qu’un
projet éolien est susceptible de s’implanter à quelques centaines de mètres du
secteur pressenti. Vous comprenez mon étonnement, n’ayant jamais été informé.
Je trouve cette situation surprenante et tenais à vous faire part de mes
interrogations, quant au manque évident de transparence entourant une telle
situation. Je suis par ailleurs maire de la Chapelle-des-Fougeretz, en
Ille-et-Vilaine et ainsi parfaitement informé de la nécessité d’une large
information pour associer le plus possible les populations, notamment celles de
toute proximité ».Le projet Pierre
et Vacances a été tué, dès lors que le terme « parc éolien » a été
prononcé.
« Le préfet, dans sa grande sagesse, a refusé l’installation classée
pour la protection de l’environnement (ICPE). Nous l’avons accompagné dans sa
décision, car il a aussitôt été attaqué par EDPR
« Nous le savons tous, les
investisseurs ont les moyens financiers de tenir le temps d’une longue
procédure, contrairement aux associations qui ne peuvent pas suivre et de
l’État qui, à un moment donné, passe à autre chose. Toutefois, la Ligue de
la protection des oiseaux (LPO), France nature environnement (FNE), la
fédération départementale des chasseurs français (FDCF), la fédération
départementale de pêche (FDP), le syndicat mixte des Monts de la Madeleine, qui
regroupe une cinquantaine de communes, ma commune et des communes voisines, se
sont engagés dans cette démarche, aux côtés du préfet. »
Voilà crûment exposé par le maire d’une petite commune les pratiques des
margoulins de l’éolien. A vomir, n’est-il pas vrai ?
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